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‘Mr. McMahon’ sur Netflix, le vrai Vince McMahon ?

Affaires familales, scandales, procès… que vaut la série documentaire de Netflix ‘Mr. McMahon’ sur l’ascension de Vince McMahon à la tête de la WWE ?

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Netflix

Dans un contexte d’affaire Janel Grant où, pour rappel, l’ancien président de la WWE est accusé de divers abus, d’agressions sexuelles et de trafic sexuel, mais aussi dans celui où la compagnie cherche à se renouveler sans le leadership de Vince McMahon depuis son départ de la tête de TKO en début d’année, une série documentaire comme ‘Mr. McMahon’ – qui se voit ajouter le titre de « Gourou du Catch » en version française sur Netflix – ne pouvait qu’être attendue au tournant.

Annoncée en 2020, la série devait être co-produite par la WWE elle-même avec, on pouvait s’en doutait à ce moment-là, une grosse main mise sur le storytelling par la WWE elle-même. Mais suite aux révélations à l’été 2022 de l’affaire des pots-de-vin – qui se révélera être très liée à l’affaire Janel Grant ensuite -, la WWE s’est retirée de l’affaire et Vince McMahon n’a plus souhaité collaborer au projet. En résultent des heures de rush d’interview tournée entre 2021 et 2022 de McMahon lui-même et d’autres personnalités de la WWE. Les seuls ayant souhaité poursuivre étaient extérieurs à la WWE à l’image des journalistes Dave Meltzer ou David Shoemaker. Et Bruce Prichard. On comprendra à la fin pourquoi pour ce dernier n’aurait peut-être pas dû.

La série documentaire a alors pris un nouveau tournant, celui de dérouler l’histoire de la reprise de la WWE par Vince McMahon en mettant le focus sur les scandales qui ont éclaboussé l’entreprise familiale tout au long de sa carrière. Pas de quoi plaire à l’ancien président de la WWE qui aurait tenté de racheter les droits du programme.

Pas de véritable révélation

Mettons directement les choses au clair, si vous êtes fan de catch éclairé, suivant l’actualité de la WWE et bien renseigné sur l’histoire de l’entreprise, vous n’apprendrez rien de nouveau, surtout pas dans les premiers épisodes où le récit raconte comment McMahon a trahi les promesses faites à son père et empiété sur les fameux territoires des autres promotions de catch pour faire grandir l’entreprise, faire du catch non plus « un sport de pauvre » mais « un divertissement pour tous », et aller jusqu’à WrestleMania 1. « Je ne sais pas si ça a été bon pour l’industrie [du catch], mais ce qui comptait c’est que ça a été bon pour moi et mon entreprise ».

Le second épisode met un peu plus les pieds dans le plat avec les gros scandales de la fin des années 80 et de la première moitié des années 90 : L’affaire des stéroïdes qui aurait bien pu faire disparaître la WWE, l’affaire Jimmy Snuka et la mort suspecte de sa compagne, ou encore celle des Ring Boys où Tony Atlas s’avère par contre très loquace sur le sujet.

Les accusations de viol par l’ancienne arbitre Rita Marie/Chatterton sont largement traitées, tandis que McMahon continue de nier (au moment de l’interview). « La vérité c’est que ce soi-disant viol n’a jamais eu lieu » lâchait-il. « Elle était consentante, et même si c’était un viol le délai de prescription était dépassé ». Magie du montage de la série, on apprend rapidement qu’en 2023, alors que le délai de prescription est levé par la justice de l’état de New York, McMahon et Chatterton se sont entendus sur un arrangement financier pour mettre un terme au procès.

Nier, Vince McMahon l’a fait plusieurs fois dans ce documentaire. Lors de l’évocation de l’affaire des stéroïdes, mais aussi lorsque sont évoqués les catcheurs qui mourraient jeunes en raison des médicaments antidouleurs qu’ils prenaient à l’époque, préférant dire qu’ils prenaient ces médicaments de manière récréative et que le mélange avec les stéroïdes ne faisait pas bon ménage. Il nie aussi la possibilité que les commotions subies à répétition par Chris Benoit aient pu être responsables du meurtre de sa femme et son fils et de son suicide. « Chris [Benoit] est devenu fou, ça aurait pu arriver à n’importe qui », ne souhaitant en aucun cas laisser dire que la WWE serait responsable de la mort de ces catcheurs. Mais dans chacun de ces cas, la WWE prend quand même des mesures : la Wellness Policy pour les médicaments et stéroïdes ou encore l’interdiction de certaines prises pouvant causer des commotions comme les coups de chaises à la tête.

Saga familiale

L’un des pans les plus importants de cette série documentaires est la partie familiale. On connaît l’histoire familiale de l’entreprise, qui en ferait presque une sorte de Succession à la sauce catch. Entre les trahisons, désaccord et les récentes affaires, il y avait matière à raconter.

Les relations entre McMahon y sont très bien dévoilées. Que ce soit la relation entre Vince McMahon et son père Vince Sr. qu’il n’a connu qu’à douze ans mais qu’il n’a pas tardé à prendre pour modèle et qu’il voulait impressionner, jusqu’à celle avec son fils Shane qui semblait vouloir reproduire le schéma et qui se voyait assez fort en successeur de son père. Le passage de WrestleMania 32 avec le match contre l’Undertaker avec des images du retour en coulisse, ou l’histoire de la dispute racontée par Paul Heyman, sont assez parlants.

Stephanie McMahon y est aussi très présente, que ce soit pour évoquer son rôle dans l’entreprise, avec celui de Paul « Triple H » Levesque qui font de l’ombre à Shane McMahon en coulisse.

Mais c’est aussi l’occasion de se souvenir à quel point Vince McMahon avait des idées tordues pour le personnage de sa fille à l’écran. Si l’histoire du mariage non consenti avec Triple H – qui dans la storyline avait drogué celle-ci pour l’épouser à la place d’Andrew « Test » Martin et consommer le mariage, toujours sous drogue – ne vous surprend pas assez, on apprend notamment que McMahon avait pour idée de faire tomber Stephanie McMahon enceinte… de lui.

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Le vrai Vince McMahon ?

Mais l’une des raisons pour lesquelles cette série documentaire était attendue, c’est aussi parce que l’on pouvait attendre des révélations autour de l’affaire Janel Grant qui est évoquée dans le dernier épisode. Il n’y en aura malheureusement pas. Janel Grant ou ses avocats n’ont par ailleurs pas été approchés par la production de la série. On y évoque la culture du silence qui règne en coulisse parce que chacun a peur pour sa place, le fait que Stephanie McMahon, largement au courant de l’histoire, ne souhaitait plus travailler avec son père, ce que Bruce Prichard dément.

Bruce Prichard qui s’illustre de manière assez foireuse dans cet épisode. Il est l’un des seuls employés de la WWE à avoir accepté de répondre à des questions après que l’affaire ait éclaté au grand jour. Ayant vu des extraits du documentaire et interrogé sur ce qu’il en pense, Prichard ne se gêne pas pour le descendre et dire que c’est un exposé à charge contre McMahon, refusant d’admettre le côté horrible de Vince McMahon préférant se rappeler ce qu’a fait McMahon pour lui – l’histoire de sa femme pour qui McMahon a fait venir les meilleurs médecins pour la sauver d’un cancer – et ajoutant que même si McMahon était une personne horrible, il n’en parlerait pas. Et alors que l’interview se termine, deux jours plus tard la plainte de Janel Grant est révélée au grand jour.

C’est dans ce schéma, son montage et son déroulé que se révèle cette série documentaire. Si l’on n’apprend rien de nouveau dans les histoires et scandales qui y sont racontés, tout est assez bien ficelé pour que l’on comprenne à la fois les travers de l’homme qu’est Vince McMahon, la mince frontière entre l’homme et son personnage de Mr. McMahon, à quel point il a réussi aussi à s’entourer de personnes qui ne le trahiront jamais et vont même jusqu’à le considérer comme un père pour certains catcheurs.

La série Mr. McMahon révèle-t-elle « le vrai Vince McMahon » comme le souhaitaient les producteurs ? Pas à ceux qui le connaissaient déjà, en tout cas. Elle met cependant en lumière de manière très intelligente une sorte de culte de la personnalité entourant Vince McMahon, en montrant que le Mr. McMahon de la télévision et le Vince McMahon de la vraie vie ne sont pas si différents. Lui-même l’admet presque à la fin, « Parfois les catcheurs commencent à croire en leur personnage ».

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